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Expédition au Pérou
"Enorme" 19 mai, 11h du matin, simple mot sortant de notre bouche mais qui suffit à exprimer tout ce que nous ressentons au sommet du Siula Chico. Fatigués après 4 journées de grimpe intenses, la voie que nous venons d'ouvrir et de loin la plus difficile que nous ayons eu l'occasion de grimper. Nous restons là, assis sur la cime et dans les nuages, à savourer notre réussite...
Tout commence le 23 avril, nous décollons de la France pour rejoindre le Pérou et sa ville Huaraz, au porte de la cordillère des Andes. Nous formons cette fois ci une cordée de 4 alpinistes pour cette expédition. La cordée Ben Guigonnet/Fred Degoulet et Hélias Millerioux et moi.
Quatre alpinistes pour venir à bout d'une des belle face du Pérou : la face ouest du Siula Chico 6265m en cordillère Huayhuash.
Sommet voisin du Siula Grande, rendu mythique au travers du livre "la mort suspendue" et de son film. Notre projet est d'ouvrir une nouvelle voie dans cette muraille, haute de 900m et parcourue par seulement une voie.
Voici le topo de notre ascension :
En 2007, au bout de 3 tentatives, en plus de celle de Steve House et Mick Fowler, les espagnols Jordi Coromînas et Orioĺ Bario ouvrent enfin une voie sur ce sommet!!! 7 jours leurs sont nécessaire pour remonter le côté droit de la face et sortir versant sud après avoir jugé la partie finale trop raide. Au final : Une réalisation majeure faite de persévérance et de préparation.
A notre tour, nous voulons tracer une voie dans cette face. Reprenant plusieurs tentatives, la ligne que nous convoitons remonte d'un seul jet les 900m de glace et mixte pour aboutir sur les champignons sommitaux du sommet. Une ligne rare qui nous fait rêver autant qu'elle nous effraye. Des corolles gigantesques, des plaquages éphémères et de la glace raide à une altitude déjà élevé.
Nous ne savons pas à quelle sauce nous allons être mangés mais la motivation est là!!!
Un beau coucher de soleil la veille de notre ascension :
En plus de la grimpe, un autre problème survient. De sérieux risques objectifs nous oblige à avoir une progression calculée et respectée.
En effet, à partir de midi, la face passe au soleil et se décharge de nombreuses chutes de glaces et pierres. Vous comprenez donc qu'à cette heure la, au plus tard, nous sommes obligés d'arrêter de grimper et d'être dans notre bivouac obligatoirement protégé jusqu'à à la nuit suivante. Une ascension particulière donc, dans la durée, avec des réveils matinaux et des longues heures à grimper de nuit...
Mais comme tout expé, avant de se confronter au but, une longue partie est consacrée à l'acclimatation. Durant 20 jours nous allons découvrir de beaux endroits de la région et ainsi arrivé en forme.
I- Acclimatation dans la cordillère Huayhuash et escalade à Hatun Matchai
Pressés de découvrir les montagnes andines, dès notre arrivée nous partons marcher 4 journées sur le trek tour Huayhuash. Une acclimatation trop fatigante et un peu rapide jusqu'à Passo Rassac 5125m mais qui nous permet de voir de superbes paysages et de monter en altitude.
Bivouac dans la cordillère Huayhuash :
Hélias pendant l'acclimatation, tout prés du "Col Rassac" 5125m :
Ensuite, nous décidons d'aller grimper 3 journées sur le site fantastique et unique de Hatun Matchai. Un endroit qu'il faut découvrir au moins une fois dans ça vie de grimpeur!
De superbes blocs posés dans des alpages abritent des voies de 4 à 8b! Situé à 4300m je vous garanti que ça chauffe les bras!!
A 10min du secteur se trouve un sympathique refuge à l'ambiance détendue. Il pleut les après-midi mais nous avons la chance de grimper quelques belles longueurs telle que "Bloody birthday" 7b, "Apnea" 7c etc...
Hélias dans Apnea, superbe!
Fred et Ben dans une proue en 7a :
Le 3 mai, nous retournons à Huaraz pour finir nos préparatifs avant de rejoindre notre camp de base au pied de notre objectif. Nous nous laissons 3 jours dans la ville pour acheter tout ce dont nous avons besoin. A savoir : nourriture, gaz, etc... pour 20 jours en altitude. Cela nous permet de visiter Huaraz et ses lieux mythiques comme son marché couvert.
Le 6 mai, nous partons pour 3 jours de marche en direction de notre camp de base. Les choses sérieuses commencent...
II- Face ouest du Siula Chico : Ouverture de "Looking for the void"
Les 3 jours de marche nous offrent encore des vues superbes sur les paysages environnants et la rencontre avec nos muletiers (les Arrieros) est sympathique. Au total nous avons 7 mules chargées de 40 kg chacune pour acheminer tout notre matériel au camp de base.
Nos 7 mules en contrebas :
Nous établissons un confortable camp de base tout proche d'un lac.
Le 11 mai nous partons nous acclimater au camp avancé, au pied de la face. Une première étape nous attend : trouver un cheminement dans le complexe glacier du Siula Grande qui défend l'accès a notre face. La remontée est délicate, entre de nombreuses et larges crevasses ou nous avançons à tâtons.
Les sacs sont lourds car nous allons déposer du matériel. Nous pensons tous à la descente infernale de Joe Simpson, en solo avec une jambe cassée sur ce même endroit...
Du camp de base, nous mettons 2 jours pour rejoindre le pied du Siula Chico. Notre ligne est enfin visible et l'altitude est de 5330m. L'endroit de part son isolement donne une ambiance engagée.
Les faces du Siula Grande et du Siula Chico sont aussi belles que terrifiantes. De nombreux Ice flûte, champignons de neige et corolles raye les faces, une des particularité du Pérou. De temps en temps des avalanches dévalent la paroi dans un lourd vacarme mais de notre camp nous sommes très bien protégés. Nous scrutons notre itinéraire et établissons notre ascension jour par jour. Nous pouvons confirmer de nos propres yeux qu'à partir de midi, au soleil, la glace ce détache et inonde de ces projectiles, la face.
Une nuit nous suffit à juger des conditions et nous redescendons au camp de base rapidement de peur de voir les conditions se détériorer encore plus avec le soleil pesant.
Le créneau météo semble toujours correct pour les prochains jours. On décide de remonter 1 jours plus tard pour tenter notre chance!! Le 14 nous voici à notre camp de base avancé et nous attaquons la voie le 16 mai à 2 heures du matin après une journée d'attente dans le mauvais temps.
J1 : Des pentes de neige puis de glace nous dépose au crux du premier jour, une longueur en plaquage raide ou le poids des sacs et l'altitude se fait déjà sentir! Il est déjà l'heure de trouver notre bivouac. Le lieu semble peu propice pour passer la nuit. Mais, Ben et Fred s'attelle à la tâche et nous dégote un emplacement irréel protégé par la paroi. Pendant ce temps nous fixons 2 longueurs avec Hélias.
Hélias et Ben au relai entrain d'assurer Fred dans le crux du premier jour :
Notre premier bivouac a une ambiance unique!
Le 17, réveil à 2h et nous voilà partis pour un gros morceau. 6 longueurs de glace et mixte ne descendant jamais en dessous de 5+ avec une longueur en M6+. La grimpe est délicate, chaque longueurs demande plusieurs heures d'effort entre 5770m et 5980m. Vers midi, nous voilà à notre deuxième bivouac, fatigués mais le panorama est grandiose. Nous sommes au point le plus haut atteint par les différentes tentatives.
Hélias à la bagare dans le second et super raide crux en M6+ !
La dernière longueur de la journée qui va nous conduire au second bivouac :
La suite est pleine de doute car encore jamais grimpé. Nous repérons un possible passage dans des fins plaquages. Nous verrons bien demain si notre choix s'avère être le bon... Notre bivouac est un des plus beaux que nous ayons pu faire malgrés son exposition.
Le 18, on prend les mêmes et on recommence. Fred réussi à trouver la solution dans l'itinéraire, par une longueur délicate et exposé en mixte. Nous sommes content de passer ce cap tant redouté. Nous poursuivons. La tactique est simple, un grimpeur prend la tête de la cordée pour 1 ou 2 longueurs puis on interverti. Derrière, les 2 suivants remontent en grimpant ou à la jumar, hissent le sac de hissage et assure le leader. Le 4eme les rejoint ensuite.
Il fait toujours beau et nous avons de la chance. Notre progression est lente car aucune longueur ne déroulent. constamment raide, c'est raide et c'est incroyable de pouvoir grimper là. Nous posons notre 3ème bivouac à 6150m. Il neige un peu l'après midi et la nuit.
Le 19 mai, 100m nous sépare du sommet, si peu mais si loin en même temps au vu des longueurs qui nous attendent.
Ben sort le grand jeu! Une première longueur verticale sur des corolles suspendues ou l'ambiance est démente!!!
Enfin une seconde longueur, avec un passage estimé à M7, nous dépose dans une zone moins raide. Une goulotte puis l'arête sommitale et ses énormes corniches nous conduisent au sommet. Il est 11h et l'instant est magique.
Ben proche du sommet!
Sommet du Siula Chico 6265m...Looking for the void est née!
S'en suivent 4 rappels pour retrouver notre dernier bivouac. Nous décidons d'attendre minuit pour engager toute la descente et être ainsi protégés. Nos rappels s’effectuent entièrement sur abalakovs et vers le milieu de la descente le mauvais temps nous surprend. Il neige fort et chacun reste concentres à ça tâche. Plus nous descendons et plus les spindrifts grossissent. Dans le bas ils commencent à prendre des proportions importantes et nous avons du mal à faire nos lunules! Tant pis nous finirons sur des pieux à neige....
Enfin, Vers 3h30 nous retrouvons la rimaye puis notre camp de base avancé. La pression retombe et nous nous couchons dans nos duvets sans attendre. Nous sommes trempé mais la joie de la réussite nous le fait vite oublier!! Vers 11h nous retrouvons notre camp de base et son confort aprés un aller retour de 7 jours camp de base/camp de base.
Nous retrouvons Huaraz le 23 après un retour en bus mouvementé! Ce fut une expé démente ou nous avons appris à tous nos connaître. Des forts moments d'émotions passés avec 3 supers amis pour une voie de rêve.
Merci à vous tous pour nous avoir aidé à réaliser cette expédition. A savoir :
- les amis et la famille,
- la bourse FFME,
- les aide sur kiss kiss bank bank,
A bientot
Robin
